Le manteau Red River - Musée McCord Stewart - EncycloModeQC

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Le manteau Red River

Thématique

Milieu 19e siècle - Fin années 1950

Marion Robertson, Carte de souhaits, 1940-1950. Don de la succession de James Robert Beattie, M2011.34.1.1, Musée McCord

Le manteau Red River était un vêtement d’hiver pour enfant qui fut populaire pendant plus d’un siècle au Canada, soit jusqu’à la fin des années 1950. Plusieurs personnes qui l’ont porté dans les années 1930, 1940 et 1950 se souviennent très bien de la confusion provoquée par autant de manteaux identiques dans le vestiaire de l’école.

Si les francophones du Québec ne semblent pas se rappeler l’avoir porté autant que les Canadiens anglais, les journaux francophones de Montréal ont fait beaucoup de publicité pour les manteaux Red River à partir des années 1930. (Le grand magasin Dupuis Frères, dont la clientèle était majoritairement francophone, le désignait sous le nom de « manteau montagnard » dans les années 1940.) Offerts en différentes tailles, les manteaux étaient destinés aux garçons et aux filles de 2 à 14 ans.

Conférence présentée par Cynthia Cooper, conservatrice, Costume, mode et textiles au Musée McCord, Le manteau Red River : un siècle d’histoire, 23 janvier 2018

De la toute fin du 19e siècle jusqu’au milieu du 20e, les manteaux Red River étaient vendus dans les grands magasins, qui offraient aussi un service de commande postale dans tout le Canada. Les manteaux étaient presque toujours confectionnés dans du melton bleu marine, quoique les descriptions des tout premiers modèles parlent d’un tissu lainé ou encore d’un tissu Mackinaw. Les manteaux étaient typiquement nervurés et doublés de rouge. Une version à passepoil bleu pâle semble avoir été offerte, sans beaucoup de succès. Le capuchon était amovible et doublé de flanelle rouge. Jusqu’au début des années 1930, on le désignait parfois en anglais par le terme français « capuchon », occasionnellement transformé en capuchin. En fait, tout au long des années 1920, le manteau était souvent appelé « manteau capuchon » dans les publicités à Montréal. Une autre de ses caractéristiques était le passepoil rouge, qui pouvait garnir les coutures sur les côtés, aux épaules ou aux manches. Certains manteaux avaient des épaulettes bordées de rouge. La fermeture était toujours croisée avec des boutons en laiton. La doublure rouge était un autre élément typique.

Red River Coat, Markette Inc., 1940-1950. Don de Louise Hurtubise Bousquet, M2000.49.1,6-7 © Musée McCord

Au début du 20e siècle, les grands magasins Eaton et Simpsons annonçaient qu’ils fabriquaient ces manteaux dans leurs propres ateliers. Les exemples conservés au Musée McCord portent les étiquettes de deux fabricants de manteaux pour enfant de Montréal actifs dans les années 1950 et 1960 – Markette et Little Nugget – tandis qu’une information orale permet d’ajouter le nom de la compagnie montréalaise Dominion Gaiter. Un manteau datant des années 1970 porte l’étiquette de la Young Canadian Clothiers Ltd.

Le manteau était toujours porté avec une ceinture, une tuque et des mitaines assorties. À la fin des années 1920, alors que la longueur du manteau se situait au-dessus du genou, les magasins offraient des couvre-tout ou des « jambières » en tricot rouge à porter avec le manteau. Parmi les fabricants de ces accessoires en tricot, les noms des entreprises Knit-to-Fit et Regent Knit, basées à Montréal, étaient parfois mentionnés. Au milieu des années 1940, certains manteaux étaient vendus avec un pantalon assorti, souvent muni de bretelles, fabriqué dans un tissu de laine marine et orné de passepoil rouge sur les côtés.

Le manteau tire son nom de la colonie de la Rivière-Rouge, une communauté agricole située sur la Terre de Rupert – comme on désignait autrefois le nord-ouest du Canada – fondée en 1812 pour servir les intérêts du commerce des fourrures. Plusieurs des colons étaient de descendance mixte autochtone et européenne. Ils étaient connus sous le nom de Métis, un terme inclusif englobant des personnes issues de diverses Premières Nations, d’origines anglaise et française, et de confessions protestante et catholique.

Un capot bleu, un manteau à capuchon fait d’un lourd tissu de laine, parfois avec des boutons de laiton ou des épaulettes, que l’on portait avec une ceinture, était largement associé à l’identité du commerçant de fourrure métis. La Grande-Bretagne a expédié de grandes quantités de capots manufacturés dans les territoires de la traite des fourrures. Dans la seconde moitié du 19e siècle, un capot blanc ou de couleur claire était porté dans le centre et le nord-est de l’Amérique du Nord pour pratiquer la raquette et le toboggan. Ces sports d’hiver, inspirés du savoir-faire autochtone, sont devenus une expression de l’identité canadienne naissante. Les femmes et les enfants ont commencé à porter le manteau à capuchon en hiver. Le modèle bleu en vint à être connu sous le nom de manteau Red River, après l’annexion de la colonie de la Rivière-Rouge à la nouvelle province du Manitoba, entrée dans la Confédération en 1870.

Les annonceurs ont souvent associé une version romancée de l’histoire des Métis et des Canadiens français au manteau, bien que dans sa forme miniature, il ait servi à aseptiser et à effacer cet aspect du passé du Canada en faveur d’une nouvelle identité canadienne coloniale. Alors que la popularité du manteau tirait à sa fin, les annonceurs se sont mis à en vanter les qualités historiques, soulignant qu’il faisait maintenant partie du monde matériel d’une enfance canadienne traditionnelle. Le manteau était si étroitement lié au vécu des enfants canadiens que l’auteure Mary Peate a utilisé son nom dans le titre de son livre où elle raconte son enfance à Montréal dans les années 1930, Girl in a Red River Coat.

Date de publication

01/02/2019

© Musée McCord Stewart 2024