Marc Cognac, Jacques de Montjoye dans son atelier, 1959. Don de Jacques de Montjoye, M2015.34.2.26 © Musée McCord
Reconnu comme dessinateur de grand talent, il fait ses classes à Paris auprès de Paul Colin, peintre décorateur célèbre pour ses affiches, puis à l’École de la Chambre Syndicale de la couture parisienne. Il commence sa carrière de couturier à titre de dessinateur-modéliste chez Raphaël, à Paris, où ses croquis de tendances sont régulièrement publiés dans les journaux. Arrivé au Canada en 1949, il dessine d’abord des collections pour un manufacturier de vêtements sport. Puis, alors qu’il entreprend une carrière solo comme couturier, il fait la connaissance de Marie-France Rousseau (Marie France de Paris), couturier d’origine belge avec laquelle il conçoit le projet de créer l’Association des couturiers canadiens.
Le regroupement des créateurs verra officiellement le jour en 1954, avec Raoul-Jean Fouré comme président.
Jacques de Montjoye participe aux principaux événements de l’Association des couturiers canadiens, dont le premier défilé collectif, présenté au Ritz-Carlton à Montréal et à l’hôtel Pierre à New York en 1954.
Grâce à l’appui des compagnies canadiennes de textiles qui fournissent les tissus, comme DuPont Canada et Dominion Textile, l’événement promotionnel attire l’attention à la fois sur les collections des couturiers et sur les tissus canadiens. Peu après la fondation de l’association, en 1956, Jacques de Montjoye entreprend avec Raoul-Jean Fouré une collaboration qui se poursuivra jusqu’en 1963. Les couturiers habillent la femme de la tête aux pieds et ont à cœur de prodiguer des conseils sur la manière de se vêtir. C’est dans cet esprit que Jacques de Montjoye participe au début des années 1960 à l’émission L’éternel féminin, sur les ondes de Radio-Canada, et qu’il publie aux Éditions du Jour, en 1966, un livre intitulé Savoir s’habiller.
MODE EXPO 67 • Jacques de Montjoye
Jacques de Montjoye, entrevue réalisée dans le cadre de l'exposition Mode Expo 67, novembre 2016 © Musée McCord
Les collections de Jacques de Montjoye, d’abord pour femme puis pour homme, sont présentées dans les grands défilés de mode à Montréal et au Canada, de 1963 à 1972.
Lors d’un défilé de l’Association des couturiers canadiens à Expo 67, devant des personnalités du monde entier, il présente une collection symbolique de quatre robes, qui se veut très provocatrice.
Une de ses créations dénonce ouvertement l’intervention des États-Unis au Vietnam, et une robe intitulée Mon pays c’est l’hiver se veut un hommage à Gilles Vigneault.
En 1964, le couturier acquiert une boutique sur la rue Crescent où pendant quelques années il vend à la fois des objets anciens et des vêtements de sa création. Il déménage sa boutique en 1967, au 2070 de la rue Crescent, pour y offrir en 1968 une première collection pour homme. En 1970, la boutique est entièrement réaménagée et décorée au goût du jour par Claude Girard, avec des miroirs et des couleurs vibrantes. Pendant cette période, Jacques de Montjoye crée des uniformes pour les hôtesses et les guides du pavillon du Canada à l’Exposition internationale d’Osaka au Japon, pour les employés de la Maison de Radio-Canada et du gouvernement du Québec, ainsi que des costumes pour le théâtre et le ballet.
Au début des années 1970, après 25 années dans l’industrie de la mode, Jacques de Montjoye devient enseignant à l’École de mode du Collège Marie-Victorin. Le partage de son savoir est apprécié des nombreux étudiants qui, sous son égide, acquièrent les rudiments de la profession et, surtout, bénéficient de son talent créateur. Parmi les jeunes designers inspirés par son enseignement, on compte Louise Vincent et Marcel Dénommé, qui fonderont la réputée marque Dénommé Vincent, de même que Philippe Dubuc. Jusqu’en 1990, Jacques de Montjoye enseigne le dessin de mode, en plus de collaborer à l’élaboration des programmes de l’École de mode du Collège Marie-Victorin et d’assurer, jusqu’en 1985, les relations extérieures de cet établissement. À l’été 1988, à la demande de l’Association des manufacturiers de vêtements du Pérou, il met sur pied un cours de design de mode à Lima, dans le cadre du SACO (Service administratif canadien aux organismes). Il récidive quelques années plus tard à Carthagène, en Colombie, où son intérêt pour la culture latino-américaine l’amène à partager sa vie pendant quelques années entre le Québec et l’Amérique latine.
Il crée également des costumes de scène pour la compagnie de danse contemporaine Deuxalamori, de Bogotá.
La carrière de Jacques de Montjoye est caractérisée par la diversité et par un sens artistique aigu. Illustrateur de mode au trait sûr, ses esquisses sont vives et délicates, mettant en valeur le vêtement avec élégance.
En tant que couturier, il est moins à l’aise dans la conception systématique de collections saisonnières que dans les gestes inédits. L’originalité de ses vues, tant sur la mode que sur la société, se manifeste par maints coups d’éclat. Ses tuniques pour homme du tournant des années 1970, si elles n’obtiennent pas le succès commercial escompté, frappent l’imagination et contribuent à l’image de Montréal comme ville de mode et de créativité. Certaines de ses pièces pour homme, sa robe emblématique Mon pays c’est l’hiver, ainsi que son fonds d’archives, sont conservés au Musée McCord.
Sources
Charest, Nicole. « Des robes pleines d’idées », Perspectives, 18, 6 mai 1967, p. 34.
« Deux mondes se rejoignent : la mode et le « show-biz » », La Presse, 10 octobre 1968, p. 40.
« Fashion Shows Popular: Different Approach Is Key », The Gazette, 23 septembre 1964, p. 19.
« Hommes nouveaux », Perspectives dimanche, 27 septembre 1970, p. 18-19.
« Jacques de Montjoye : Souplesse, fluidité, allure, gaieté », Photo Journal, 1er au 8 juin 1963, p. 38.
Montjoye, Jacques de. Savoir s’habiller, Montréal, Éditions du Jour, 1966, p. 132.
« Un couturier engagé », Sept-Jours, 1er juillet 1967, p. 32-33.
Date de publication
01/10/2004
Rédaction
Françoise Dulac, Dicomode
Révision
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