Lithium Manufacturing Co., une marque de mode urbaine montréalaise, a été fondée par Charles Kay en 1993. Aspirant DJ lorsqu’il était adolescent, Kay était un amateur de musique électronique et il a lancé Lithium à 17 ans durant les vacances d’été du cégep. Au début, Kay sérigraphiait et brodait des tee-shirts et des chapeaux avec des logos graphiques de Lithium, mais c’est la première pièce coupée et cousue de la marque, une veste de style vêtement de travail, qui a fait un malheur auprès de la jeunesse urbaine et est devenue un uniforme pour les ravers de Montréal et de Toronto.
Avec le temps, Lithium a élargi son offre pour inclure des collections et des accessoires de mode urbaine avant-gardistes pour homme et femme.
Le lancement de Lithium coïncide avec la montée des raves clandestins qui durent jusqu’aux petites heures à Montréal, et Kay vend souvent ses vêtements directement à ses pairs durant ces fêtes techno. Lithium connaît une ascension rapide, et la marque est bientôt offerte dans des boutiques locales de mode urbaine et de rave comme Aritmetik et Juan & Juanita.
En 1996, Lithium a déjà percé le marché américain et ses vêtements sont vendus dans plus de 150 magasins aux États-Unis.
La marque possède des bureaux de vente à Montréal, à New York, à Tokyo et à Hong Kong, avec des magasins de détail dans le quartier du Plateau à Montréal et une boutique phare dans le district Shinjuku de Tokyo. Lithium fut l’une des premières marques de mode de rue canadiennes à atteindre une renommée internationale : à son apogée, elle était vendue dans 18 pays.
Au cours des années 1990, le style de Lithium évolue au rythme des tendances chez les jeunes, Kay participant toujours au design et au développement des produits. De 1993 à 1996, Lithium est très axée sur le rave, offrant des vêtements ornés de logos graphiques ainsi que des pantalons extralarges appelés « fat pants », (largeurs de jambe offertes en 51, 61, 68 et 76 cm). En 1997, avec le designer Willo Perron, Lithium s’oriente vers une esthétique hip-hop minimaliste. Grâce aux contacts et au réseau de Perron, la marque est vendue par Union, le haut lieu de la mode urbaine à New York, renforçant ainsi sa crédibilité dans la rue. En 1998, un nouveau designer, William Georges, qui avait travaillé à la pige comme graphiste pour Stüssy, se joint à Lithium. Sous son influence, la marque adopte un style plus techno et futuriste, mettant davantage l’accent sur les modèles et les coupes complexes. Un vêtement iconique est conçu durant la période où Georges travaille pour la compagnie, le pantalon Boom Clock de 1999, fabriqué dans un tissu performance synthétique et réfléchissant avec des jambes à fermeture à glissière transformables. À la fin de la décennie, Vanessa Stettler, qui avait travaillé comme designer pour la marque de rave torontoise Snug, se joint à Lithium où elle s’occupe de la création des collections pour femme.
Si Lithium est reconnue pour sa gamme unique de pantalons, les tee-shirts graphiques représentent un incontournable de la marque, des douzaines de logos étant créés pour la collection de chaque saison.
Kay se souvient de l’immense popularité des tee-shirts à logo abordables, vendus à près de 30 000 exemplaires chaque saison.
Au début, les vêtements Lithium étaient fabriqués localement, mais vers la fin des années 1990, alors que les modèles deviennent plus complexes et commerciaux, la marque commence à faire produire la majorité de ses pièces à l’étranger. Troy Moorehouse, du géant de la mode de rue Triple Five Soul, invite Kay à visiter ses manufactures en Chine, et les deux collaborent à la création de modèles pour leurs marques. Le distributeur de Moorehouse au Japon aide Kay à lancer ses produits dans ce pays et un magasin ouvre ses portes à Tokyo.
En phase avec sa clientèle urbaine et marginale, Lithium commandite des artistes et des DJ hip-hop des années 1990 et du début des années 2000 tels que The Black Eyed Peas, Goldie et A-Trak.
La marque fait de la publicité dans des magazines comme Paper, Vibe et le magazine de la contre-culture britannique Dazed & Confused.
Vice accorde toujours le contreplat de sa page couverture à Lithium comme espace publicitaire. Kay est un ami intime des fondateurs Shane Smith et Suroosh Alvi et, à un moment donné, les trois planifient de collaborer à la création de magasins Vice à New York, à Toronto et à Montréal, un projet qui ne s’est jamais concrétisé.
Lithium a connu ses meilleures années de 1993 à 2000 environ, mais à l’aube du nouveau millénaire, avec le vieillissement de sa clientèle cible et la mode jeunesse de la contre-culture qui se tourne vers une esthétique indie rock, la marque n’a plus la crédibilité de la rue qui avait été à l’origine de son succès. En 2003, Kay avait vendu les marques de commerce de la compagnie à son distributeur au Japon, où Lithium a maintenu ses activités pendant encore plusieurs années.
Bien qu’ils ne travaillent plus dans l’industrie de la mode, Kay et Vanessa Stettler, qui est devenue sa femme, produisent des meubles, des luminaires et des accessoires qui sont destinés aux consommateurs ou loués pour des événements, dirigeant les entreprises Prunelle, Modern Event Furniture et Jardin Royalmount.
Sources
Interview avec Charles Kay, Montréal, Québec, 6 avril 2022.
Lunardon, Catherine. « Northern Exposure », Women’s Wear Daily, 18 février 2003, SII40-SII41.
Rabinovich, Simona. « Taking it to the Street », The Montreal Gazette, 6 avril 1998, F6
Date de publication
24/02/2023