Mode masculine
Blouson de motocycliste (détail), Morris Leather Garments, années 1950. Don du Dr et de Mme Arthur G. Leith, M2001.87.1 © Musée McCord
Si les termes « homme » et « mode » étaient considérés mutuellement incompatibles durant le 19e siècle et une bonne partie du 20e, les vêtements masculins, tout autant que féminins, ont suivi les tendances de la mode reflétant les changements au sein des sphères culturelle, économique et politique, de même que l’évolution des perceptions relatives à la masculinité et la féminité.
Depuis sa création à la fin des années 1600, l’habit fait partie des essentiels de la garde-robe masculine, et son style a été redéfini au gré de l’évolution de l’idéal masculin.
À la cour des rois de France Louis XIV (1643–1715) et Louis XV (1715–1774), les hommes portaient des tissus de couleurs vives et des tenues ornées de manière extravagante. L’habit trois pièces, composé d’un gilet, d’une veste et d’une culotte confectionnés dans un tissu précieux, a été adopté par les riches Européens et transporté en Nouvelle-France.
Là-bas, comme en Europe, les vêtements pour hommes rivalisaient avec ceux des femmes par leur splendeur, leurs couleurs et leurs fioritures, et les hommes s’habillaient de manière flamboyante sans craindre la réprobation sociale.
Une mode masculine plus active fait son apparition à la fin des années 1700, inspirée par le style de vie pastoral du gentleman de la campagne anglaise.
Elle se distingue par sa coupe près du corps mettant en valeur un physique avantageux, par ses couleurs sobres et ses tissus de laine robustes. Au milieu du 19e siècle, avec la montée d’une classe bourgeoise puissante et artisane de sa propre réussite, l’industriel d’âge moyen devient le nouveau modèle de l’idéal masculin. Désireux d’exhiber sa nouvelle richesse, mais craignant de passer pour un « nouveau riche », il privilégie les couleurs sombres et évite l’ostentation. Les subtilités d’une confection soignée, des tissus de qualité et un code vestimentaire complexe reflètent le statut économique et social. Les marchands et les industriels cherchant à afficher le style confiant de ce formidable idéal se tournent vers des tailleurs locaux comme l’entreprise montréalaise Gibb & Co. Fondée par Benaiah Gibb à la fin du 18e siècle, la firme offrira ses services à l’élite montréalaise jusqu’à sa fermeture en 1968.
Un prototype plus juvénile de la masculinité idéalisée apparaît au tournant du 20e siècle.
Pour répondre au mode de vie actif de l’homme, le « complet » polyvalent, avec son veston raccourci, devient un élément incontournable de sa garde-robe. D’abord réservé aux activités de loisir, le complet peut être porté au travail lorsqu’il est confectionné dans des tissus plus fins, et peut même être adapté en tenue de soirée, le « smoking ». Encore aujourd’hui, le complet demeure la tenue de bureau classique.
Au début du 20e siècle, un idéal jeune, raffiné et mondain est incarné par le style vestimentaire du populaire prince de Galles, venu au Canada en 1919 et 1923, et plus tard par l’élégance des grands acteurs des films hollywoodiens des années 1930 et 1940. La période de l’entre-deux-guerres de 1919–1938 est considérée comme l’âge d’or de la confection pour hommes, avec une multiplication des sources de production des vêtements masculins. Si les fabricants de prêt-à-porter offrent des complets abordables et de bonne qualité, les tailleurs sur mesure sont encore recherchés.
Avec les mouvements culturels des années 1960 et 1970 qui viennent ébranler les notions établies de l’identité masculine, la mode pour homme recommence à intégrer des couleurs vives, des motifs audacieux et des tissus comme le velours et la dentelle, un mouvement parfois appelé « révolution du paon ».
Jacques de Montjoye (n. 1928), de Montréal, est l’un des créateurs ayant embrassé cette tendance à réinventer la mode masculine.
Depuis lors, la culture populaire couvre un spectre beaucoup plus large d’idéaux masculins, incluant ceux de la culture queer et autres sous-cultures. La commercialisation de la masculinité a créé un espace pour une gamme bien plus vaste d’options mode, permettant aux hommes de flirter avec l’exhibition. Dans la mode masculine prédominante, toutefois, les styles plus conservateurs continuent de régner, héritage d’une période – il y a 150 ans – où les normes sociales imposaient aux hommes de circonscrire soigneusement leur intérêt pour la mode.
Date de publication
01/02/2019
Rédaction
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